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Faune

Engager le dialogue pour favoriser le retour des prédateurs, utiles à la biodiversité

Après avoir frôlé l'extinction, des loups gris et bisons d'Amérique ont été réintroduits aux Etats-Unis. ©AdobeStock

Des espèces autrefois en danger d’extinction connaissent aujourd’hui un rebond, lié à de fructueux programmes de réintroduction. Une aubaine pour les écosystèmes qu’elles habitent et revitalisent. Mais la pérennité de leur retour dépendra d’une prise de conscience sociétale quant aux bienfaits qui en découlent. Pour la Fondation 30 Millions d’Amis, seule la voie du dialogue permettra cette acceptation.

Des loups gris et bisons d’Amérique du Nord aux lynx et gypaètes en France… Nombreuses sont les espèces autrefois menacées qui renaissent ces dernières années, grâce à des programmes de réintroduction. Si ces dispositifs semblent ainsi avoir porté leurs fruits, les experts restent sur leurs gardes : leur efficacité sur le long terme dépendra de l’acceptation par les populations locales, notamment des chasseurs et des éleveurs.

Restauration des espèces et des écosystèmes

Si la réintroduction des grands prédateurs participe, par définition, à la conservation d’espèces dévastées par la faute de l’Homme, elle contribue plus globalement à la restauration des écosystèmes. « Qui dit retour d’une espèce dit retour des équilibres écologiques, confirme Charles Thévenin, chercheur au Muséum national d’histoire naturelle (Reporterre). La réintroduction, c’est aussi et surtout la restauration de fonctions perdues dans l’écosystème. »

Ainsi, aux Etats-Unis, « Réintroduire le loup gris dans le parc national du Yellowstone [dans les années 1990, NDLR] a eu, et a encore, un énorme impact positif », assure le chercheur Joe Gosling (Ecography, avril 2022). Forçant leurs proies – herbivores – à se déplacer, les prédateurs permettent la régénération des rivières et prairies. Or, la diversification de la végétation contribue elle-même à l’épanouissement de nombreuses espèces menacées, comme les castors qui, à leur tour, favorisent la biodiversité. Les barrages qu‘ils bâtissent représentent une zone d’habitat, de reproduction et de nourriture pour de nombreux animaux, tels les campagnols, oiseaux sauvages, amphibiens et insectes aquatiques ! En parallèle, le développement de la biodiversité végétale permet de capter et de stocker le CO2 dans le sol, au point d’atténuer les émissions de gaz à effet de serre et de lutter contre le réchauffement climatique.

 

Qui dit retour d’une espèce dit retour des équilibres écologiques

Charles Thévenin - MNHN

Autant de vertus que possède également le bison d’Amérique. Estimés à 30 millions, ses effectifs ont chuté à la fin du 19ème siècle – lorsque le gouvernement américain a tenté de l'éradiquer pour affaiblir les peuples amérindiens – pour frôler l'extinction en 1889. Grâce aux politiques de conservation mises en place au cours du dernier siècle, l’espèce atteint aujourd’hui près de 500 000 individus. Une étude récente a confirmé les bienfaits de ces animaux pour les terres et l’environnement naturel : « Leur présence dans les prairies a pour effet de doubler la diversité végétale, affirme l’étude. Leur réintroduction pourrait ainsi aider à restaurer la biodiversité » (Proceedings of the National Academy of Sciences, août 2022).

En France, c’est le gypaète barbu qui fait son retour depuis 2012, dans le ciel des Cévennes« Chaque année, au printemps, on dépose de jeunes gypaètes barbus dans des cavités rupestres, témoigne Noémie Ziletti, chargée d’études à la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Pendant un mois, on les surveille du lever au coucher du soleil jusqu’à ce qu’ils prennent leur envol. » Ces rapaces au plumage orangé jouent un rôle écologique non négligeable, en tant qu’alternative non polluante aux équarisseurs industriels : « Ces oiseaux jouent un rôle primordial dans l’élimination naturelle des cadavres », confirme la spécialiste.

Dialoguer avec les chasseurs et les éleveurs

Pourtant, le retour des grands prédateurs ne fait pas toujours l’unanimité. Le fondateur du Pôle Grand Prédateurs Jura – Patrice Raydelet – évoque, à ce titre, « les corporations qui ont des intérêts particuliers à faire intégrer dans la tête de la population de fausses idées ». Les rapaces sont victimes de cette désinformation. « On ne compte plus le nombre de rapaces vulnérables et faisant l'objet de plans nationaux et européens de conservation (Milan royal, Gypaète barbu ...) qui sont tirés, empoisonnés ou piégés » (en toute illégalité !), fustige Colette Carichiopulo, chargée de mission juridique pour la LPO. « Le bruit court que les rapaces s’attaquent au bétail vivant. C’est une rumeur totalement infondée qui nous montre à quel point le travail de sensibilisation est primordial », ajoute Noémie Ziletti. 

Le lynx boréal, lui aussi, en a payé un lourd tribut. Et pour cause, la moitié des félins réintroduits dans les Vosges entre 1983 et 1993 auraient disparu : « Les chasseurs ne supportaient pas qu’un prédateur vienne taper des brocards, déplore Patrice Raydelet, spécialiste du félin (Reporterre). Dès l’instant où un nouvel arrivant pénétrait sur leur terrain de jeu, ils le dézinguaient impunément. Ça a été une catastrophe. » Actuellement encore, « les chasseurs clament la régulation du lynx qui, parce qu’il se nourrit d’ongulés sauvages, est vu comme un concurrent », tance Gilles Moyne, directeur du Centre de soins Athénas.

 

Le travail de sensibilisation est primordial

Noémie Ziletti - LPO

Pourtant « dans de nombreux pays, les chasseurs eux-mêmes sont parties prenantes de la conservation du lynx », explique la Société Française pour l’Etude et la Protection des Mammifères. Par exemple, en Allemagne, les réintroductions de lynx ont été décidées en concertation avec l’ensemble des parties prenantes - y compris chasseurs et éleveurs - tous favorables à la conservation de l’espèce. En 4 ans, 20 lynx ont été réintroduits et une dizaine de naissances a été comptabilisée, tandis qu’aucun acte de destruction n’a été déploré. « Le succès de ce type d'opération passe par ce long travail de médiation et de concertation, assure Sylvain Gatti, chargé de mission PNA lynx. Sinon on se retrouve avec un climat polarisé, et délétère, comme il persiste encore dans le massif des Vosges plus de 30 ans après les réintroductions. »

L’information des populations locales est, à cet égard, un élément essentiel au bon déploiement des politiques de réintroduction et, par la même occasion, à la renaissance d’une faune autrefois dévastée et à l’équilibre des milieux naturels !