Difformes, boiteux, déplumés… Dans un élevage de 35.000 volailles en région Pays-de-la-Loire fournissant la marque Maître Coq, des lanceurs d’alerte ont filmé les poulets issus de la sélection génétique. Devenus si gros qu’ils ne tiennent plus debout, certains agonisent au sol. La Fondation 30 Millions d’Amis demande au ministre de l’Agriculture Julien Denormandie – qui s’est exprimé sur le broyage des poussins, la castration à vif des porcelets ou encore sur les contrôles en abattoirs – de proposer un plan de sortie du modèle de l’élevage intensif.
« Ici, c’est littéralement "marche ou crève" ! ». L’actrice Julie Depardieu décrit avec effroi les images filmées en juin 2021 par des lanceurs d’alerte dans un élevage situé à Torfou (49), et diffusées par l’association L214. Au sein de cette exploitation de 35.000 poulets fournissant la marque Maître Coq [filiale du volailler LDC, NDLR], les volailles sont issues de la souche « Ross 308 », sélectionnée génétiquement afin de grossir le plus vite possible. « Aujourd’hui, les poulets de chair standards atteignent 1,5 kg de poids corporel en moins de 30 jours, alors qu’il fallait 120 (jours) dans les années 1950 », selon un rapport de la Commission européenne cité par les défenseurs des animaux. En conséquence, certains gallinacés ne parviennent même plus à soulever leur propre poids pour atteindre les systèmes d’abreuvement, agonisant sur leur litière recouverte d’excréments.
Sélectionnés pour grossir plus vite, les poulets peinent à tenir sur leurs pattes. ©L214
Problèmes cardiaques, maladies de peau et boiteries
Des conséquences désastreuses pour le bien-être animal, également documentées par la science. D’après une étude norvégo-britannique, à densité égale, les poulets à croissance lente – dont la prise de poids n’excède pas 50 g par jour – manifestent davantage de comportements de jeu et d’exploration que leurs congénères à croissance rapide (Scientific Reports, 09/2020). En grossissant à un rythme effréné, les poulets souffrent de pathologies cardiaques, de maladies de peau et de boiteries, autant de handicaps inhibant l’expression de leurs comportements naturels, soulignent les auteurs. « Se détourner des souches à croissance rapide serait le moyen le plus efficace pour améliorer la vie des 142 millions de poulets produits en Europe chaque semaine », avait déclaré Annie Rayner, chercheuse à l’école vétérinaire de Bristol (R.-U.) et co-auteure de l’étude.
Se détourner des souches à croissance rapide serait le moyen le plus efficace pour améliorer la vie de 142 millions de poulets chaque semaine.
Annie Rayner, chercheuse
Selon un document photographié par les lanceurs d’alerte dans l’élevage angevin fournissant Maître Coq, sur un même « lot » d’animaux, plus d’un millier sont déjà morts... avant même de partir à l’abattoir ! Pourquoi tolérer autant de pertes ? « Ce qui intéresse les filières, c'est de vendre l'alimentation animale (graines) aux éleveurs. La mortalité des volailles importe peu », expliquait Sébastien Arsac, co-fondateur de L214, à 30millionsdamis.fr (12/2020). « Aujourd’hui, LDC et ses marques Maître Coq, Marie et Le Gaulois continuent à élever des poulets dans des conditions désastreuses, sans aucune considération pour ces animaux, tance Brigitte Gothière, co-fondatrice, par communiqué. Alors que près de 90 entreprises de l’agroalimentaire comme Carrefour, Leclerc, KFC (...) ou encore Bonduelle se sont déjà engagées contre les pires pratiques de l’élevage intensif des poulets, l’absence d'engagement du leader de la production en France est injustifiable ».
Dénonçant l’utilisation de souches de poulets à croissance rapide par le groupe LDC à travers une pétition, L214 annonce par ailleurs porter plainte auprès du procureur d’Angers (49) concernant le « programme lumineux » [éclairage artificiel visant à reproduire, en bâtiment fermé, l’alternance naturelle jour-nuit, NDLR] mis en place par l’éleveur. « D’une part, l’intensité lumineuse minimale prévue par la réglementation européenne (20 lux) n’est pas respectée pendant une grande partie de la vie des poulets, de façon à ce qu’ils ne soient pas trop actifs et prennent plus de poids, précise l’association. D’autre part, pendant près de la moitié de la durée d’élevage, le programme lumineux prévoit des périodes d’obscurité d’une durée très inférieure au minimum légal (à savoir 6 heures, dont 4 heures au moins en continu) pour pousser les animaux à manger davantage. » Autrement dit, des « journées » assombries et des « nuits » trop courtes.
Place aux actes !
Si le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie s’est récemment exprimé sur la fin du broyage des poussins et de la castration à vif des porcelets ou encore sur le renforcement des contrôles en abattoirs (07/2021), aucun plan de sortie du modèle de l’élevage intensif – auquel plus de 8 Français sur 10 s’opposent (baromètre Fondation 30 Millions d’Amis /Ifop, 2021) – n’a jusqu’ici été proposé. Alors que les instances européennes semblent (enfin) se montrer attentives à la volonté citoyenne, la Commission européenne ayant annoncé qu'elle allait formuler une proposition législative mettant fin progressivement à l'élevage en cage à partir de 2027, le bilan du gouvernement d’Emmanuel Macron en matière de bien-être animal reste – pour l’heure – insuffisant. Stop aux effets d’annonce, place aux actes !
Ajoie 31/07/2021 à 12:24:39
AnneV 30/07/2021 à 19:41:42
Les "annonces" de Macron insuffisantes ? Le mot est faible !!!!!!!!!!!! Seuls les français pourront mettre fin à ces horreurs en cessant d'acheter et en dénonçant, parce que côté politique, c'est consternant !