Affamé, assoiffé, l'éléphant Kaavan détenu au zoo d'Islamabad (Pakistan) se balançait sans cesse sous l'effet de la solitude. ©Anika Sleem /Free the Wild
Dans un zoo depuis 35 ans, Kaavan, un éléphant d'Asie, doit être transféré vers un sanctuaire, a proclamé la justice pakistanaise (21/05/2020). Déjà victime de maltraitances et de troubles du comportement dus à la solitude, l'état de santé du pachyderme s'est dégradé brutalement en raison d'un manque d'eau et de nourriture. La Fondation 30 Millions d'Amis – qui milite pour accorder la « personnalité juridique » aux animaux, assortis de droits fondamentaux – se réjouit de cette décision juridique susceptible de servir d'exemple.
Il avait été surnommé « l'éléphant le plus seul du Pakistan » ! Kaavan, un pachyderme âgé de 36 ans, devrait enfin pouvoir quitter le zoo de Marghazar pour être relâché dans un sanctuaire ; ainsi en a décidé la Haute-Cour d'Islamabad, la capitale. « Les animaux [...] ont-ils des droits légaux ? La réponse à cette question, sans aucune hésitation, est oui », a déclaré le Président du tribunal Athar Minallah, arguant que la crise du Covid-19 pourrait constituer une « opportunité pour les humains de faire preuve d'introspection et de se sentir concernés par la douleur et la détresse dont souffrent les autres êtres vivants. »
Les animaux ont-ils des droits légaux ? Sans aucune hésitation, oui.
Juge Athar Minallah
Offert à la République Islamique du Pakistan par le gouvernement du Sri-Lanka en 1985, le pachyderme – enchaîné par les pattes dans un sordide enclos agrémenté d'un étang souillé – était contraint, depuis la mort de sa partenaire Saheli en 2012, de subir la solitude permanente. Balancements incessants d'une patte sur l'autre, mouvements stéréotypés, le comportement anormal de l'éléphant avait fini par alerter les visiteurs du zoo, remarquant également de multiples stigmates sur son corps meurtri. En 2016, la chanteuse américaine Cher avait pris fait et cause pour le pauvre animal en partageant une pétition, récoltant plusieurs centaines de milliers de signatures. L'indignation mondiale s'était renforcée 3 ans plus tard, alors que Kaavan commençait à s'amaigrir de façon inquiétante. En cause, les gardiens du zoo... accusés d'avoir détourné la nourriture destinée à leur malheureux pensionnaire !
Des associations de défense des animaux saluent aujourd'hui une avancée susceptible de servir de modèle à l'étranger. « Le courageux pas en avant [du juge Minallah] envers les êtres non-humains opprimés tels que Kaavan est admirable, de même que la persévérance des avocats de Kaavan qui se sont battus sans relâche pour lui, félicite Kevin Schneider, directeur exécutif de l'ONG américaine Non-human Rights Project (NhRP). Nous avons hâte de porter cette décision à la connaissance des tribunaux de New York et du Connecticut, que nous exhortons à reconnaître le droit à la liberté de nos clientes éléphantes Happy et Minnie. »
20 000 –
nombre d'éléphants captifs dans le monde (source : ElephantVoices)
Détenue en captivité au zoo du Bronx (USA) depuis une quarantaine d'années, l'éléphante Happy – première de son espèce à avoir réussi le « test du miroir », révélateur de la conscience de soi – souffre elle aussi du poids écrasant de la solitude, privée de relations sociales depuis plus de 12 ans. Sa congénère Minnie est, quant à elle, forcée de se produire en spectacle au zoo de Commerford (USA), où ses compagnes d'infortune Karen et Beulah sont mortes dans des circonstances troubles. Les juristes du NhRP poursuivent leur combat pour faire reconnaître, devant les tribunaux américains, le droit fondamental de ces deux éléphantes à ne pas être emprisonnées sans un jugement équitable (procédure d'habeas corpus, propre au droit anglo-saxon, NDLR). En France, la Fondation 30 Millions d'Amis milite de son côté pour accorder la « personnalité juridique » aux animaux, s'accompagnant d'un régime de protection et de droits fondamentaux.
A l'instar de Kaavan, l'éléphante Mara – sauvée d'un cirque – a récemment pu bénéficier d'un transfert depuis l'éco-parc de Buenos Aires (Argentine) vers un vaste sanctuaire brésilien, où l'attendaient 3 congénères. De formidables exemples de reconnaissance, par nos sociétés, de l'intelligence et de la sensibilité des pachydermes... mais qui ne doivent cependant pas faire oublier la situation dramatique de leurs quelque 20 000 congénères toujours captifs dans le monde. Notamment en Thaïlande, où plus de la moitié des 3700 éléphants exploités pour le tourisme sont victimes d'un abandon massif, enchaînés et mal-nourris dans des camps, depuis que les visiteurs ont déserté le pays en raison de l'épidémie de Covid-19.
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