Bien que de nombreuses fois désavoué devant les tribunaux, le gouvernement s’entête (encore !) à autoriser certaines chasses traditionnelles. Même le calendrier étonne, puisqu’il ne correspond pas à ce qui avait été annoncé par le ministre de la transition écologique. Faut-il y voir la pression de la Fédération Nationale des Chasseurs ? La Fondation 30 Millions d’Amis s’interroge.
Et ça continue, encore et encore. Le gouvernement semble une nouvelle fois se soumettre au lobby de la chasse : le 4 octobre 2022 le ministère de la transition écologique a pris deux séries d’arrêtés autorisant la chasse aux matoles (cages) et pantes (filets) dans 4 départements pour la saison 2022/2023. Ces techniques pourront être utilisées pour chasser l’alouette des champs, une espèce pourtant protégée dont les effectifs décroissent. Si ces arrêtés ont été mis en consultation dès cet été, le ministre, Christophe Béchu, s’était néanmoins engagé le 2 août dernier devant l’Assemblée nationale – donc solennellement – à attendre la décision définitive du Conseil d’Etat sur les arrêtés suspendus pour la saison 2021/2022... Décision toujours pas rendue à ce jour. Que s’est-il donc passé entre août et octobre ?
Interrogé samedi 8 octobre sur la matinale de France info, le ministre dit «assumer». De son propre aveu, « la ligne du gouvernement [étant] la protection des espèces protégées », sa position paraît pour le moins fragile et ses décisions contradictoires. Nonobstant, questionné sur ses déclarations à l’Assemblée nationale le ministre a fait un pas de côté : « Compte tenu des éléments en notre possession, [nous avons décidé] de réautoriser ces chasses qui sont extrêmement limitées », affirmant par ailleurs que les nouveaux arrêtés "s’appuient sur des fondements juridiques qui n'ont pas encore été examinés (par le Conseil d'Etat, NDLR)". Autrement dit, des arrêtés qui ne sont pas illégaux... en tous cas, pas encore !
Sollicité sur le point de savoir si cette décision avait été imposée par l’Elysée, Christophe Béchu n’a pas répondu directement. Se bornant à dire qu’il « assume la décision qui a été prise », il paraît là confirmer, en creux, qu’il n’a tout simplement pas eu voix au chapitre. D’autant que – simple hasard de calendrier ? – le Président et le secrétaire national de la Fédération Nationale des Chasseurs ont été longuement reçus par Emmanuel Macron le 26 septembre dernier. Au menu notamment, la question des chasses traditionnelles précisément... Il semblerait donc que le ministre de la transition écologique ait, dans les faits, plutôt contresigné une décision prise par l’Elysée, au mépris des engagements qu’il avait lui-même pris face à la représentation nationale.
Il est cependant loin d’être acquis que cette autorisation soit juridiquement valide, contrairement à ce qu’affirme Christophe Béchu. Le nouvel « arrêté-cadre » (support juridique permanent des arrêtés annuels autorisant les chasses traditionnelles, qui eux doivent être renouvelés chaque année), s’il contient effectivement une justification inhabituellement longue pour un acte de cette nature, pourrait tout à fait contrevenir à la directive « oiseaux » de 2009. La LPO a d’ores-et-déjà annoncé son intention d’attaquer – à nouveau – ces nouveaux arrêtés prochainement. Par une décision du 6 août 2021, le Conseil d’Etat avait annulé les arrêtés autorisant ce type de chasses pour les saisons 2018/2019, 2019/2020 et 2020/2021. Il avait également suspendu, le 25 octobre 2021, des décisions analogues pour la saison 2021/2022. L’espoir reste donc permis d’un nouveau désaveu du gouvernement par la plus haute juridiction administrative sur ce sujet.
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