Fondation 30 Millions d'Amis

Fondation 30 Millions d'Amis
Faites un donFaire un don

La Ferme des Aubris

La Ferme des Aubris, un havre de paix pour les équidés maltraités ou abandonnés

Le refuge de la Tuilerie

Refuge "la Tuilerie" un havre de paix pour les animaux sortis de l'enfer

 €

Votre don ne vous coûte que
XXX après réduction fiscale

Protection

Fin de la castration à vif des porcelets : une partie de l'industrie porcine nous prendrait-elle pour des « jambons » ?

10 millions de porcelets mâles castrés à vif chaque année dans les élevages français. ©Kameron Kincade /unsplash

Alors que la castration à vif des porcelets doit être interdite à la fin de l'année 2021, certains industriels du secteur prévoiraient de continuer à pratiquer cette mutilation... « sous anesthésie ». Une mesure pourtant insuffisante pour contrôler la douleur, s'alarment les défenseurs des animaux à l'appui de vétérinaires. L'analyse de 30millionsdamis.fr.

Mise à jour : Le président de la filière porc du groupe Bigard a annoncé en conférence de presse que « Bigard maintiendra la castration en 2022, pour 100 % des animaux abattus par le groupe » (21/05/2021).

Parmi les avancées attendues en 2021 en faveur des animaux, la fin de la castration à vif des porcelets avait été annoncée par l'ex-ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation Didier Guillaume, pour une entrée en vigueur prévue le 1er janvier 2022. Mais selon l'association Welfarm pour la défense des animaux de ferme, à l'origine d'une tribune publiée par le quotidien Libération (22/12/2020), certains industriels du secteur se prépareraient à contourner cette mesure. Si cette crainte était avérée, ce serait une très mauvaise nouvelle pour les 10 millions de porcelets mâles castrés à vif chaque année dans les élevages français.

La castration des porcelets est pratiquée de façon quasi-systématique à travers l'hexagone pour éviter l'odeur désagréable émise par la chair d'une partie des cochons mâles (environ 4 % d'entre eux) au moment de la cuisson... Si le gouvernement a certes annoncé l'interdiction de cette mutilation « à vif » pour éviter la souffrance animale, la formulation stricto sensu adoptée par le ministère de l'Agriculture pourrait ouvrir une « brèche » dans laquelle l'industrie porcine envisagerait de s'engouffrer, avertissent les défenseurs des animaux. Ainsi, le syndicat des industriels du secteur, Culture Viande, a déclaré dans un communiqué vouloir « explorer toutes les pistes [...] qui permettront [...] de poursuivre au 1er janvier 2022 la castration des animaux dans le cadre de la loi » (14/12/2020), à savoir poursuivre la castration des porcelets non plus « à vif », mais « sous anesthésie »... Habile tour de passe-passe sémantique, au détriment du bien-être animal.

L'anesthésie des cochons, inefficace et favorable aux dérives ?

Car, selon un avis de la Société nationale des groupements techniques vétérinaires (SNGTV) et de l'Association des Vétérinaires exerçant en Productions Organisées (AVPO) publié le 20 mars 2020 : « En ce qui concerne la gestion de la douleur durant la chirurgie, de nombreux travaux ont été réalisés, tant en France qu'à l'étranger, pour trouver une méthode applicable en élevage. Aucune ne nous semble satisfaisante aujourd'hui, tant pour des raisons techniques,  de  stress  ou  de  douleur  pour  l'animal, que  de  difficultés  de  mise  en œuvre par les éleveurs ».

 

Bon nombre de porcelets continueront à être mutilés à vif. Des manquements qui resteront probablement impunis.
Welfarm

Autrement dit, même sous anesthésie, les porcelets castrés risquent de ne pas être épargnés par la souffrance ! « Par ailleurs, compte tenu de la complexité liée à la mise en œuvre de l'anesthésie en élevage et du surcoût économique qu'elle engendre, il est fort probable que bon nombre de porcelets continueront à être mutilés à vif, pronostique l'association Welfarm. Et comme il ne peut pas y avoir un inspecteur vétérinaire derrière chaque éleveur qui castre ses animaux pour vérifier qu'il recourt bien à l'anesthésie, ces manquements resteront probablement impunis. »

Également engagée pour la défense des animaux de ferme, l'association Compassion In World Farming (CIWF) partage cette inquiétude, considérant la castration sous anesthésie « acceptable (...) seulement pendant la période de transition vers la fin totale de la phase de castration chirurgicale ». « L'arrêt total de la castration (...) implique des ajustements aux pratiques d'élevage habituelles que certains industriels ne souhaitent visiblement pas tous implémenter, confie à 30millionsdamis.fr Laetitia Dinault, responsable communication et medias de CIWF. Pourtant, le mouvement est lancé par d'autres acteurs du secteur ». Ainsi, dix organisations de producteurs de porc du Grand Ouest se sont notamment engagées à s'approvisionner auprès d'élevages ayant arrêté la castration des porcelets (23/06/2020).

Des alternatives déjà disponibles

Le recours à la castration chirurgicale des porcelets peut effectivement être évité, en mettant en place des alternatives... tout aussi efficaces ! « Depuis 2012, les éleveurs du groupement leader sur le marché du porc français, la Cooperl, ont cessé de castrer les cochons. Les carcasses odorantes sont détectées sur la chaîne d'abattage et orientées dans un circuit de transformation sans cuisson tel que le jambon ou le saucisson (l'odeur ne se révélant qu'à la cuisson), explique Welfarm. D'autres éleveurs ont quant à eux recours à un vaccin [une technique appelée « immunocastration », NDLR] qui bloque temporairement la puberté des porcs mâles et donc de l'hormone à l'origine du risque d'odeur. »

« La castration des porcs peut être évitée grâce à un abattage plus précoce, à des pratiques d'élevage permettant de réduire l'odeur de verrat et à l'élimination des carcasses contaminées de la chaîne de production », confirme Laetitia Dinault. Si la vaccination diminue les niveaux d'hormones responsables de l'odeur en retardant la maturité sexuelle des animaux, l'élevage de mâles entiers (non-castrés) est également possible, à condition d'adapter les pratiques. Il s'agit notamment d'ajuster l'alimentation des cochons pour diminuer la formation du scatol – l'un des principaux composés odorants – lors de la digestion, mais aussi de veiller à la propreté du logement ou encore à la luminosité.

 

L'élevage de mâle entier a fait ses preuves, tant en France qu'à l'étranger.
Représentants des vétérinaires

Cela permettrait non seulement de réduire la souffrance de plusieurs millions de cochons chaque année, mais également de favoriser la santé des consommateurs et la préservation des écosystèmes... le tout, sans perte économique pour les éleveurs. « Les avantages à cette méthode sont, entre autres, un coût de production plus faible, une augmentation de l'indice de consommation et de la vitesse de croissance des animaux, une production de carcasses plus maigres [avec moins de matières grasses, NDLR], une réduction de la quantité d'azote exporté dans les effluents », énumère la représentante de CIWF. « L'élevage de mâle entier a fait ses preuves, tant en France qu'à l'étranger », confirme pour sa part la profession vétérinaire dans son communiqué.

Interdire toute forme de castration chirurgicale

Pour éviter qu'une partie de l'industrie porcine ne se retranche derrière la solution – inefficace et dangereuse – de la castration sous anesthésie, la Fondation 30 Millions d'Amis réclame l'interdiction de toute castration chirurgicale des animaux, ainsi que des mesures encourageant le développement d'alternatives telles que l'immunocastration et l'élevage de mâles entiers. La caudectomie (coupe de la queue des porcelets pour éviter que les animaux ne se mordent entre eux sous l'effet du stress) doit également être bannie au profit de l'amélioration des conditions de vie des animaux. Autant d'exigences qui s'inscriraient dans une sortie du modèle de l'élevage intensif, prônée par plus de 8 Français sur 10 (baromètre Fondation 30 Millions d'Amis /Ifop, 2020).