Au début du mois de mai 2024, l’Anses a préconisé un étiquetage sur le bien-être animal, sur le modèle du nutri-score. Ce dispositif peut-il – à lui seul – être un gage d’amélioration des conditions d’élevage des animaux de ferme ? 30millionsdamis.fr a recueilli l’avis des associations L214 et Welfarm.
Améliorer les conditions d’élevage. Voilà l’objectif affiché de la récente proposition de l'Agence Nationale Sécurité Alimentaire (Anses). Au début du mois de mai 2024, l’organisme s’est auto-saisi pour recommander la création d'un étiquetage du bien-être animal pour informer les consommateurs sur les conditions de vie des animaux d'élevage. « C’est une initiative intéressante qui comprend plusieurs niveaux de règlementations, reconnaît Ghislain Zuccolo, directeur de Welfarm. Les indicateurs sont ambitieux mais ils peuvent prendre du temps. »
L’évaluation prendrait en compte huit indicateurs de « l’état de bien-être animal », soit : les caractéristiques génétiques, les techniques d'élevage, les pratiques de l'éleveur, l'hébergement, l'alimentation, les démarches mises en œuvre pour assurer la bonne santé des animaux, la limitation du recours à des pratiques stressantes ou douloureuses et la reproduction. « L’Anses s’est prêtée au jeu, ce sont des critères à observer avec attention », souligne de son côté Brigitte Gothière, co-fondatrice de L214. Mais pour G. Zuccolo, « il faudrait que cela devienne obligatoire ».
Quid des contrôles dans les élevages ?
« Il faut que les contrôles s’établissent par un organisme certificateur »
Ghislain Zuccolo, directeur Welfarm
L’idée semble donc bien accueillie par les différents acteurs de la protection animale. Toutefois, si le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire décide de se saisir de ces recommandations, la question des contrôles suscite l’interrogation. Alors que le « Plan abattoir » lancé en 2021 évoque « de nouveaux contrôles généralisés et coordonnés dans l’ensemble des abattoirs d’animaux de boucherie », Brigitte Gothière rappelle que les contrôles existants ne représentent seulement « que 1 % des élevages en France ». Une donnée problématique pour l’application des réglementations déjà mises en œuvre pour les agriculteurs. « Il faut que les contrôles s’établissent par un organisme certificateur plutôt que par les pouvoirs publics », réclame Ghislain Zuccolo.
La France dispose d’un réseau de 240 abattoirs de boucherie en 2021, (bovins, ovins, caprins, porcins, équins, et gibiers d’élevage) selon les données du gouvernement. Cela n’inclut pas les volatiles, représentant « 68 % des animaux abattus en France » d’après L214.
Des infractions récentes
Les « contrôles officiels » sont pourtant mentionnés noir sur blanc sur le site du ministère de l’Agriculture : « De leur arrivée à l’abattoir jusqu’à leur mise à mort, chaque étape est régulièrement contrôlée par un agent de l’État dûment formé à [des] contrôles spécifiques », mentionne le site internet. Pourtant, des images dévoilées par L214 lève le voile sur une toute autre réalité. La dernière enquête en date montre l’abattage sans étourdissement de bovins ainsi que des actes de violences délibérées. « Nos enquêtes ont révélé des infractions et certaines enseignes ont déjà été mises en demeure ». Preuve que « la mise en œuvre de l’étiquetage bien-être animal peut être difficile », confirme le directeur de Welfarm.
Une prise de conscience attendue
« Nous devons instaurer en Europe un étiquetage alimentaire transparent »
CIWF France
« Nous devons instaurer en Europe un étiquetage alimentaire transparent, comprenant un descriptif clair du mode d’élevage pour que le consommateur puisse avoir un rôle plus engagé dans la protection du bien-être animal », relève de son côté le CIWF France sur son site internet. Pour Brigitte Gothière de L214, plus qu’un étiquetage à l’image du nutri-score, l’offre autour des produits alimentaires doit opérer « un vrai changement » : « On l’a bien vu avec les poules pondeuses l’année dernière, rappelle la militante. Nous pensions que l’étiquetage des œufs allait changer la donne. Or, c’est lorsque le prix des œufs élevés en plein air a baissé que la tendance s’est inversée. »Les poules pondeuses élevées en cage représentaient 80 % de la production en 2018. Un chiffre chutant à 23 % en 2023.
G. Zuccolo remarque quant à lui une « prise de conscience du consommateur ». Mais si la filière des poules pondeuses a témoigné d’une évolution sans précédent, « certaines filières ne bougent pas, comme l’élevage de dinde ou des vaches laitières, liste le directeur de Welfarm. Selon lui, 7 % des élevages laitiers français ne laissent jamais leurs vaches accéder au pâturage. « La situation, c’est celle-ci, et il faut en prendre conscience », insiste-il auprès de 30millionsdamis.fr
84 % des Français contre l’élevage intensif
Le 23 mai 2024, devant l’hémicycle, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire a affirmé que « l’élevage industriel n’exist[ait] pas ». Une affirmation mensongère qui nie la réalité des faits. Car en dépit des quelques avancées en Europe pour les animaux d’élevage (fin des cages conventionnelles pour les poules, fin de l’élevage en batterie pour les veaux…), la souffrance animale est quotidienne dans un élevage intensif. « Trois millions d’animaux sont abattus chaque année dans les abattoirs », relève B. Gothière.
La Fondation 30 Millions d’Amis rappelle que 84 % des Français s’opposent à l’élevage intensif selon le dernier baromètre 2024 qu’elle a réalisé avec l’IFOP.
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