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Biodiversité

« Justice pour le vivant » : l’État condamné pour carence à lutter contre le déclin de la biodiversité

Les produits phytosanitaires sont largement responsables du déclin des populations d'abeilles...et des conséquences dramatiques qu'il peut avoir sur tous les autres animaux, dont les humains! © Adobestock.

Le tribunal administratif de Paris a condamné l’État pour son incapacité (ou son manque de volonté…) à lutter contre l’usage de pesticides dans l’agriculture intensive, dont la responsabilité sur le déclin du vivant est aujourd’hui largement documentée. 30millionsdamis.fr revient sur cette décision inédite.

Après le succès de « l’affaire du siècle », qui avait débouché sur une condamnation historique de l’État pour l’insuffisance de son action en matière de lutte contre les dérèglements climatiques, son équivalent pour la protection de la biodiversité, « justice pour le vivant », aurait pu aboutir à une conclusion comparable. 5 ONG (Pollinis, ASPAS, Notre affaire à tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER) avait en effet introduit un recours devant le Tribunal administratif de Paris. Elles demandaient que l’État soit, d’une part, condamné pour son incurie (sa « carence à agir »), et d’autre part qu’il lui soit enjoint de prendre les mesures nécessaires à une diminution suffisante de l’utilisation des pesticides sur le territoire national. Le tribunal a fait droit à leurs demandes… mais en partie seulement.

Le juge a en effet reconnu le « préjudice écologique » induit par l’usage des produits phytosanitaires et leurs effets sur la biodiversité, comme sur la qualité des eaux souterraines. Il a aussi reconnu que l’État est en partie responsable de ce préjudice, et lui enjoint de prendre « toutes mesures utiles de nature à réparer » ce préjudice écologique, d’ici le 30 juin 2024.

Toutefois, si le juge reconnaît bel et bien que l’État est fautif en ce qu’il n’a pas respecté ses propres objectifs de réduction des pesticides et en ce qu’il a failli à protéger la qualité des eaux souterraines, il rejette en revanche sa responsabilité quant aux processus d’évaluation et de mise sur le marché des produits phytosanitaires. Plus précisément, il reconnaît que ces processus sont insuffisants (au regard du principe de précaution), mais considère que le lien entre cette insuffisance et le déclin de la biodiversité n'est pas certain. Les ONG ont d’ores et déjà annoncé qu’elles feraient appel sur ce point, car elles espèrent obtenir une révision des processus d’évaluation de la dangerosité des pesticides.

Il y a urgence !

Il faut dire qu’il y a urgence. Les conclusions des scientifiques qui travaillent sur la question se multiplient, et vont toutes dans le même sens: la biodiversité, c’est-à-dire l’ensemble des êtres vivants et les écosystèmes dans lesquelles ils vivent, est dans un état de plus en plus alarmant. En outre, plus la situation dure, plus il sera difficile de l’enrayer, ou même de l’atténuer : les êtres vivants existent dans des systèmes. Dès lors, les bouleverser produit des effets en cascade, qui aggravent à leur tour le phénomène d’effondrement du vivant, qui pourrait donc finir par devenir incontrôlable. Même si la nature est farouchement résiliente, et que les actions humaines peuvent aussi être vertueuses, la décennie 2020 est un moment de bascule, durant lequel il est essentiel d’agir avec force.

Si de multiples facteurs sont en cause dans le déclin de la biodiversité, il en est quelques-uns dont l’impact néfaste est à la fois massif et largement documenté. Parmi ceux-ci : l’usage de nombreux pesticides, dont l’usage échevelé ne se dément malheureusement pas. Or, en tant qu’ils sont des produits qui nécessitent une autorisation administrative pour être mis sur le marché, leur circulation et leur utilisation sont, in fine, de la responsabilité de l’État. C’est donc bien à lui d’agir.

Une condamnation qui reste un pas significatif

Cette condamnation partielle reste cependant une bonne nouvelle : c’est désormais à la justice administrative que l’État devra rendre des comptes. Il y a cependant encore loin de la coupe aux lèvres. L’exemple de « l’affaire du siècle » est ainsi plus nuancé qu’il n’y paraît, puisque le Conseil d’État continue de demander, chaque année, de nouvelles mesures à l’État, de sorte que la situation semble encore loin d’être améliorée.

S’agissant de « justice pour le vivant », on se gardera d’autant plus d’un optimisme excessif que la demande d’injonction formulée par les ONG n’a pas réellement été suivie, puisque le tribunal se borne à exiger que soient prises « toutes mesures utiles » sans préconiser lui-même des mesures précises, si ce n’est de respecter les objectifs de réduction fixés antérieurement par l’État lui-même. Pour le reste, il doit simplement présenter des mesures d’action à une date d’ici au 30 juin 2024. Soit précisément le type de solution adopté dans « l’affaire du siècle ».

Il reste qu’il y a lieu de se réjouir, car il s’agit d’une étape supplémentaire dans la lutte contre le déclin de la biodiversité. Après le succès relatif de la COP 15 sur la biodiversité, après le retrait définitif des trois principaux pesticides néonicotinoïdes cette année, face au constat d’une progression de la prise de conscience de la catastrophe en cours pour la vie sur terre, et alors que cet enjeu a longtemps été le parent pauvre de la cause environnementale, il y a donc matière à parler d’une avancée significative.

Par conséquent et même si ce n’est pas suffisant, la Fondation 30 Millions d’Amis se réjouit de cette décision.