Fondation 30 Millions d'Amis

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Législation

L’État abandonne-t ’il les sanctuaires au profit des cirques ?

Un cirque Zavatta sur un parking à Roissy-en-France, photographié le 25 mai 2025. / ©Fondation 30 Millions d’Amis

Si l’interdiction des spectacles itinérants avec animaux approche (1er décembre 2028), la motivation du Gouvernement semble reculer ! Dans un décret publié le 2 mai 2025, l’État accorde de nouvelles aides aux circassiens, et envisage même de soutenir financièrement la création de structures de cirques fixes, leur laissant la possibilité de poursuivre leurs spectacles et détenir de nouveaux animaux. Quant aux projets d’agrandissement ou de création de sanctuaires pour animaux sauvages, ils restent bloqués. La Fondation 30 Millions d’Amis a fait part de ses inquiétudes au ministère de la Transition écologique.

À qui la priorité ? Entre ce qu’a prévu le législateur pour épargner les animaux de cirque et les récentes mesures prises par le Gouvernement en faveur des circassiens, il y a de quoi perdre le fil. En effet, alors que des obstacles, en partie financiers, compromettent l’interdiction d’animaux sauvages dans les cirques itinérants d’ici le 1er décembre 2028, un décret publié le 2 mai 2025 ne vient rien arranger. Au contraire, l’avenir des animaux de cirque s’avère des plus flou. Car, au lieu d’apporter les financements nécessaires aux structures d’accueil pour en possibilité de recueillir les animaux sauvages issus des cirques, l’État semble se ranger du côté des circassiens en les faisant bénéficier de fonds publics… dont sont privés les sanctuaires !

Jusqu’à 50.000 euros par animal cédé !

Quelques exemples relevés par la Fondation 30 Millions d’Amis mènent à ce constat : le décret « relatif à l'accompagnement financier des établissements itinérants de présentation au public d'animaux d'espèces non domestiques » présente cinq mesures, et toutes soulèvent leur lot de préoccupations. Parmi elles, la « mesure 3 » prévoit « une aide à la mise au repos des animaux non domestiques détenus en établissement itinérant de présentation au public » [Article 1]. En clair, le Gouvernement offre une enveloppe généreuse aux circassiens pour tout animal cédé à un sanctuaire [Article 19]. Et les sommes sont exorbitantes !  « 50 000 euros par spécimen d'éléphant ; 30 000 euros par spécimen d'hippopotame ; 5 000 euros par spécimen d'alligator ; loup, 3 500 euros par spécimen d'otarie ; 500 euros par spécimen de primate » … « Ce n'est pas une aide mais une contrepartie financière à la cession d'un animal, qui peut s'apparenter à une rétribution financière ou un prix », réagit Lorène Jacquet, Responsable Campagne et Plaidoyer à la Fondation 30 Millions d’Amis.  

De là l’incompréhension : pendant que les circassiens sont récompensés de placer des animaux, les structures d’accueil, qui s’occuperont des espèces recueillies jusqu’à la fin de leur vie, ne bénéficient quant à elle d’aucune aide étatique pour ces soins onéreux ! « En résumé, les circassiens vont pouvoir utiliser les sanctuaires comme maisons de retraite pour les animaux dont ils veulent se débarrasser, sans avoir à s'engager formellement à cesser leur activité et en touchant de l'argent public en contrepartie », déplore Lorène Jacquet

Des aides promises, sans justification économique

Le décret annonce d’autres avantages financiers, tels qu’une « aide à la transition économique des entreprises » à hauteur de 100 000 euros, versée sur le seul engagement de ne pas continuer les cirques itinérants d'animaux sauvages après le 1er décembre 2028.

Ce plan d’accompagnement des circassiens prévoit également une aide de 100 000 ou 150 000 euros pour la reconversion et la formation des titulaires de certificats de capacité pour tout animal non domestique [Article 18]. S’ajoute à cela une aide mensuelle pour l'entretien des animaux dont le circassien souhaite se séparer mais qui ne trouvent pas de structure d'accueil [Article 1], ainsi qu’une prise en charge de la stérilisation – essentielle – des fauves.

Face à ces cadeaux budgétaires, la Fondation 30 Millions s’inquiète que ces aides ne soient pas liées entre elles : « Cela signifie qu'un circassien peut bénéficier de fonds publics lorsqu'il cède ou veut céder des animaux à un refuge, tout en conservant son activité – sans bénéficier de l'aide à la transition, ni à la reconversion – et en pouvant potentiellement acquérir de nouveaux animaux plus attractifs s’il décide de s’installer en structure de cirque fixe », analyse L. Jacquet.

Inciter les cirques itinérants… à devenir fixes !

Mais le Gouvernement ne se limite pas à octroyer des sommes considérables aux circassiens. Dans un communiqué publié le 2 mai 2025, le ministère de la Transition Ecologique a annoncé le prochain lancement d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) pour accompagner « les professionnels circassiens itinérants souhaitant s’orienter vers des structures fixes de présentation au public des animaux ». Autrement dit, le Gouvernement voudrait permettre aux circassiens itinérants de poursuivre leurs activités, en créant des cirques fixes… avec l’argent public. Un projet totalement incohérent avec l’objectif initial de la loi du 30 novembre 2021 ! « Ce projet de soutien public aux cirques fixes entend maintenir un modèle obsolète de divertissement autour de l’animal, dénonce la Fondation 30 Millions d’Amis. Cela signifie que le ministère trahit l’ambition du législateur ! »

Par conséquent, la Fondation 30 Millions d’Amis s’oppose à cet AMI et dénonce l’attribution de fonds publics pour la création de cirques fixes dans la mesure où ce soutien préoccupant pourrait faciliter le développement de zoos au rabais dans lesquels des animaux sauvages continueraient d'être exploités pour le divertissement.

 

Un meilleur fléchage des aides aurait pu éviter une situation de blocage.

Lorène Jacquet, Fondation 30 Millions d'Amis

À ce titre, la Fondation 30 Millions d’Amis a interpellé – sans retour à ce jour – la conseillère Biodiversité de la Ministre de la Transition écologique : « Nous sommes conscients de la problématique du manque de places pour les animaux actuellement exploités par les cirques, mais un meilleur fléchage des aides aurait pu éviter une situation de blocage et faciliter la prise en charge dans des structures adaptées », plaide-t-elle dans son courrier. La Fondation appelle une fois de plus le ministère à faire preuve de la plus grande vigilance quant au strict respect de la législation et à encourager les circassiens à se reconvertir et à céder leurs animaux à des structures d’accueil soutenues par l’État. 

Des sanctuaires délaissés par l’État…

À l’inverse, l’État semble délaisser les sanctuaires, garants du bien-être des animaux issus des cirques itinérants jusqu’à la fin de leur vie. Pourtant, en mars 2023, le ministère de la Transition écologique avait annoncé par communiqué de presse l’objectif « un refuge pour chaque animal », afin d’accueillir « environ 500 animaux de cirque dont 300 fauves » concernés par la législation.

C’est pourquoi le ministère avait lancé, en 2022 et 2023, deux appels à manifestation d’intérêt (AMI), chacun visant à créer et financer des capacités d’accueil et permettre la cession des animaux sauvages captifs par les circassiens d’ici le délai imparti. Toutefois, le dernier communiqué du ministère précise que « neuf projets ont ainsi été soutenus, permettant la création de 150 places pour animaux de cirque concernés par l’interdiction, dont 60 places spécifiquement dédiées aux félins », sans pour autant affirmer que d’autres AMI visant à soutenir les sanctuaires seront lancés d’ici l’entrée en vigueur de la loi.

Comme indiqué dans un précédent article publié en mars dernier [LIEN], la Fondation 30 Millions d’Amis s’étonne de l’absence d’AMI en 2024, et du retard conséquent des financements accordés aux projets de sanctuaires. « Malgré nos relances, le ministère refuse de prendre en charge les frais d’entretien des animaux de cirques placés dans des sanctuaires », déplore Aline Maatouk, Chargée de mission Faune Sauvage à la Fondation 30 Millions d’Amis. Et pourtant, il y a urgence !

…et des projets d’accueil suspendus !  

Ainsi, les obstacles à la bonne application de la loi persistent. À ce jour, le Refuge de l’Arche (53), partenaire de la Fondation 30 Millions d’Amis et lauréat du premier AMI en 2022, a dû revoir son projet à la baisse. « On aurait voulu commencer les travaux dès 2024, confie Jean-Marie Mulon, directeur du Refuge de l’Arche à 30millionsdamis.fr. Après le vote de la loi du 30 novembre 2021, personne n’a pris en compte le coût de fonctionnement qui représente pour nous 400 000€ annuels de frais nouveaux. Le projet que nous prévoyons pour accueillir dix grands félins et une dizaine de primates issus du cirque est au ralenti car depuis le 8 avril nous attendons la signature d’un avenant que doit nous envoyer le ministère. C’est long… » Malgré ces obstacles, « nous ferons tout pour être prêts en amont de 2028, même si cela sera difficile », assure tiutefois Jean-Marie Mulon.

Plus loin, dans les Landes, même problématique. Le projet BIG CATS, lauréat de l’AMI 2022 à hauteur de 544.000€ est suspendu, faute d’obtenir une autorisation d’ouverture (AOE) [procédure engagée validée par le préfet pour tout établissement accueillant des espèces sauvages : ndlr]. Après plusieurs dossiers déposés, cette autorisation a toujours été refusé par la préfecture. Face à ce blocage, l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) a été saisie, et un rapport a été transmis au ministère le 15 avril dernier. « Ils nous ont demandé de modifier le dossier déposé et la préfecture s’est engagée envers le cabinet du ministère à délivrer un avenant d’ici le 6 mai, et aujourd’hui, nous n’avons toujours rien », indique Mickael Cardinel, président de BIG CATS, à 30millionsdamis.fr.

 Une situation qui empêche l’avancée des travaux, jusqu’à contraindre le porteur du projet à les financer sur ses fonds personnels ! Or, « plus de 700 félins [en France] laissés sans solution de placement, vivant dans des conditions précaires et nécessitent un lieu de vie adapté à leurs besoins. Pour certains la seule porte de sortie sera l'EUTHANASIE si rien n'est fait », alerte l’association BIG CATS dans une pétition. En parallèle, dans une lettre ouverte, 55 vétérinaires dénoncent le blocage administratif du projet Big cats pour les félins sauvages. « On ne baisse pas les bras, il faut sauver ces animaux ! », réagit M. Cardinel

Un décret sanction qui se fait attendre !

L’annonce de ce plan d’accompagnement soulève l’incompréhension…jusque sur les bancs des députés ! Dans un courrier adressé à Agnès-Pannier Runacher, ministre de la Transition écologique, la députée Corinne Vignon (Ensemble pour la République) s’interroge « sur les intentions du Gouvernement quant à l'avenir des animaux de cirques ». L’élue appelle la ministre à « appliquer strictement la loi historique adoptée en 2021 » en soutenant financièrement les sanctuaires pour organiser un accueil suffisant et adapté aux caractéristiques de ces animaux. « C'est la priorité, plutôt que de promouvoir la sédentarisation des cirques, qui ne répondent plus ni à l'attente du public, ni aux exigences éthiques auxquelles la loi de 2021 a entendu répondre en matière de bien-être animal », insiste Corinne Vignon.

La Fondation 30 Millions d’Amis enjoint le ministère de la Transition écologique de garantir le strict respect de la législation et une protection optimale des animaux concernés. Car, alors que le décret relatif au plan d’accompagnement des circassiens a été publié au Journal Officiel le 2 mai 2025, le ministère n’a toujours pas fixé de sanction en cas de violation, par les cirques itinérants des interdictions de faire naître, acquérir et vendre des animaux sauvages… pourtant l’une des mesures phares de la loi !