Le centre-équestre Gally-River dans l’Oise est en colère après la mise à mort d’une biche au pied de l’établissement par deux chasseurs, au mépris de la sécurité des montures et des cavaliers. L’acte de chasse est pourtant légal. La Fondation 30 Millions d’Amis dénonce – une fois encore – des pratiques dangereuses à l’égard des promeneurs… et des animaux !
À quand un encadrement plus strict de la chasse ? Lundi 13 janvier 2025 dans l’après-midi, une biche est grièvement blessée par balle par deux chasseurs, en pleine forêt à Avilly Saint-Léonard (Oise). L’animal, le ventre en sang, tente de les semer et se rapproche au plus près du centre équestre Le Gally River, « à une quinzaine de mètres » des boxs de chevaux. Cette distance, bien en deçà des réglementations fixées par l’office français de la biodiversité (OFB) – au moins 150 mètres des habitations – n’offre aucune protection au cervidé, finalement abattu par deux nouveaux tirs.
Mise en danger de la vie d’autrui
Cela prend des proportions inimaginables
Sylvie C. - Trésorière du centre équestre Gally River
Patrick C., adhérant du club hippique, est encore sous le choc : « Cette biche souffrait et saignait beaucoup. Elle a été tuée alors qu’elle se trouvait littéralement contre la paroi du box. » Témoin de cette scène de « boucherie », l’adhérant exprime son incompréhension face à ces chasseurs et demande des explications : « Ils ont prétexté qu’il s’agit d’une zone de rabat, précise-t -il. En plus de cela, des miradors [poste d'observation des chasseurs : ndlr] sont installés à une dizaine de mètre du club. Ils ne devraient pas être là ! ».
Mais la distance ne figure pas le seul point d’interrogation. Lorsque la biche est abattue de deux coups de fusil, Isabelle T., membre du comité de direction du centre, affirme que les chasseurs « n’ont averti personne, ni un adhérent du club, ni la palefrenière qui se trouvait à quelques mètres de l’animal », et s’indigne de la « mise en danger d’autrui ». « Ce n’est pas la première fois qu’un animal est abattu à proximité du centre, mais là, avec cette biche tuée juste derrière les boxs, cela prend des proportions inimaginables !, s’indigne auprès de 30millionsdamis.fr Sylvie C., trésorière du centre équestre. En tirant deux fois, ils ont provoqué la panique chez nos chevaux ». L’OFB impose pourtant aux chasseurs de « toujours prendre en compte son environnement avant d’effectuer un quelconque tir ». Contacté, l’organisme n’a pas souhaité faire de commentaire en raison d’« un signalement / enquête en cours ».
Des règles de sécurités arbitraires
Sous les yeux de Patrick C. et Isabelle T., les chasseurs baguent l’animal mort, et ne reviennent retirer la carcasse qu’à la tombée de la nuit. « Ça m’a bouleversé de voir cette pauvre bête dans cet état, témoigne la cavalière à 30millionsdamis.fr. Juste après le décès de l’animal, ces chasseurs ont continué à rôder à proximité du club. » Une présence qui inquiète particulièrement, en semaine et en week-end. « Le lundi, jour de chasse à tir, est une journée cauchemardesque pour nous, s’indigne Isabelle T. Puis, le mardi et le mercredi, c’est la chasse à courre ! Même le week-end, nous sommes obligés de nous adapter à la présence de chasseurs pour sortir nos chevaux, et aucun panneau n’avertit leur présence ! » « On ne sort même plus nos chevaux le lundi, confirme la trésorière. C’est dangereux pour les humains, mais aussi pour les animaux ! »
Car si la chasse est autorisée sept jours sur sept, du 15 septembre au 28 février 2025, les membres du club hippique déplorent un manque de sécurité vis-à-vis des chevaux et des humains. « Ça tire à tout va ! s’indigne Isabelle. Les chevaux sont en état de stress. L’un d’entre eux ne veut même plus sortir de son box… ». Si le port d’un vêtement fluorescent est pourtant obligatoire lors de la chasse au gibier, selon Sylvie C., certains chasseurs « s’aventurent près de [leurs] boxs, parfois même sans gilet fluorescent ». Elle regrette un comportement « de plus en plus irrespectueux » à l’égard des cavaliers. En attendant les conclusions de l’OFB, la direction du club hippique explore les recours possibles pour limiter les activités cynégétiques au pied du centre équestre.
Une réglementation « floue et complexe »
La distance nationale de sécurité change d’un département à un autre.
Ariane Ambrosini - ASPAS
Miradors, distance de sécurité, panneaux… les réglementations de chasse sont parfois confuses. Tout particulièrement la distance de sécurité à 150m des habitations, mentionnée par l’OFB… qui dépend en réalité du département ! « Il n’y a pas de distance nationale de sécurité, celle-ci change d’un département à un autre, et même d’une commune à une autre », explique Ariane AMBROSINI – Responsable du Pôle juridique de l’ASPAS.
Et ce, même si le Code de l’environnement limite le périmètre de chasse aux terrains « autres que ceux situés dans un rayon de 150 mètres autour de toute habitation” ou “entourés d’une clôture » (article L. 422-10 1° et 2° du dit code). « Sauf qu’un centre équestre n’est pas forcément considéré comme un lieu d’habitation, souligne l’experte. C’est tout le problème de cette réglementation, floue et compliquée, qui dédouane les chasseurs et implique une mise en danger. Il est temps de faire évoluer la réglementation pour que celle-ci soit plus exigeante. »
Quant aux miradors, leur présence n’est pas interdite selon Ariane Ambrosini. « Toutefois, [les chasseurs] ne doivent pas tirer en direction des zones de non-chasse », rappelle la responsable juridique. En revanche, l’installation de panneaux est bien obligatoire lors de chasse à la battue, organisée les week-ends !
Que faire pour protéger son terrain ?
La protection d’une propriété privée n’empêche pas pleinement les chasseurs d’y pénétrer… Selon l’Aspas, « tant qu’un propriétaire n’a pas officiellement manifesté son intention d’interdire la chasse, son terrain est par défaut et légalement présumé chassable ». Néanmoins, même si cette opposition est actée, « des chiens de chasse peuvent pister un gibier chez un propriétaire », précise l’association, et les chasseurs peuvent s’introduire sur le terrain pour achever un animal « mortellement blessé ». C’est le cas de cette pauvre biche, abattue au pied du centre équestre. « En clair, c’est finalement aux promeneurs de faire attention aux chasseurs plutôt qu’à ces derniers de s’adapter, déplore Ariane AMBROSINI.
Face à un manque de mesures fortes pour garantir la sécurité des promeneurs et donner un peu de répit à la faune sauvage, la Fondation 30 Millions d’Amis réitère sa demande d’instaurer des week-ends sans chasse. Un voeu partagé par l'opinion publique : 8 Français sur 10 réclament cette interdiction dominicale (Baromètre Fondation 30 Millions d'Amis / Ifop, janvier 2024).
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