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Frédéric Almendros, Procureur de la République : « Le chien humanise le procès pénal »

Lol est le tout premier chien d'assistance judiciaire en France. ©Handi'chiens

Depuis trois ans, des chiens accompagnent et apaisent certaines victimes mineures lors de procédures judiciaires. Aujourd'hui, le Garde des Sceaux envisage de généraliser à tous les départements ces chiens d'assistance. 30millionsdamis.fr revient sur le témoignage de Fréderic Almendros, le Procureur de la République à l'origine de cette expérimentation auteur du livre « Le chien thérapeute » (éd. Favre).

« Je vais vous raconter son histoire, telle que [Lol] aurait pu, peut-être, vous la raconter puisqu’il ne lui manque… qu’un ordinateur. » Frédéric Almendros, Procureur de la République à Cahors, choisit dans son ouvrage « Le chien thérapeute » (éditions Favre) d’endosser la personnalité de Lol, chien d’assistance judiciaire, afin de retracer la naissance du projet CAVE CANEM (Convention d’Accompagnement des Victimes et de l’Enfance par le Chien). Développé en partenariat avec l’association Handi’Chiens, ce programme – pionnier en France et en Europe – a déjà bénéficié à plus d’une cinquantaine de personnes – majeures ou mineures, victimes ou témoins de violences – depuis mars 2019. Le magistrat du parquet revient sur cette incroyable aventure avec 30millionsdamis.fr.

30millionsdamis.fr : Bien avant que naisse l’idée du chien d’assistance judiciaire, les animaux faisaient déjà partie de votre mission puisqu’en 2007, en tant que substitut du procureur de la République  à  Saint-Denis de la Réunion, vous aviez tenté d’agir contre l’utilisation de chiens comme appâts par certains pêcheurs [une cruauté dénoncée par l’émission « 30 Millions d’Amis » en 2005, puis à travers une pétition qui avait recueilli plus de 400.000 signatures, NDLR]. Pouvez-vous nous en dire plus sur cet engagement ?

Frédéric Almendros : Cette pratique consistait à prendre des chiens, généralement volés, à leur planter des hameçons dans le corps puis à les laisser pourrir vivants pendant plusieurs jours avant de les mettre sur une planche à l’arrière du bateau, afin d’attirer les requins. En 2007, nous avions mis en place une opération d’envergure, mobilisant une vedette [navire à moteur, NDLR] ainsi qu’un hélicoptère de la gendarmerie, mais nous avions alors fait « chou blanc ». En revanche, nous étions parvenus à intercepter un individu gardant dans son jardin un chien qui n’était pas à lui, avec des hameçons plantés dans les pattes. C’était le seul cas d’espèce identifié et poursuivi en justice. Nous avions médiatisé l’affaire, dans le but de dissuader les pêcheurs impliqués dans ces faits, qui ne représentaient heureusement qu’une minorité de la profession sur l’île.

30MA : L’idée du Chien d’Assistance du Tribunal (CAT) est d’abord née aux États-Unis…

F. A. : Plus précisément en 2003, à Seattle [État de Washington, NDLR]. La procureure générale Ellen O’Neill avait un fils, Sean – malheureusement décédé cette année, raison pour laquelle mon ouvrage lui est dédié – qui devait partir à l’université. Or, il était atteint d’un très lourd handicap et n’avait pas la possibilité de parler. Sa mère a donc décidé de lui acheter un chien. Ce labrador au nom de Jeeter lui a apporté un immense réconfort. Et c’est là que tout a démarré : Mme O’Neill a pensé que des victimes d’agression pourraient elles aussi bénéficier d’une présence canine. Elle a créé la Courthouse Dogs Foundation, forte de 9 ans d’expérimentation, qui déploie aujourd’hui plus de 250 chiens d’assistance judiciaire dans 35 États américains.

30MA : Comment vous est venue l’idée d’appliquer ce principe en France, et comment vous y êtes-vous pris ?

 

Lol a pour mission d’interagir sans agir.
Frédéric Almendros

La convergence des planètes, ce n’est pas un mythe ! [Rires]. Mon épouse, ancienne présidente du Tribunal de Cahors, est devenue Présidente du Tribunal d’Agen, qui se trouve être le « pôle de l’instruction » de la cour d’appel d’Agen [toutes les procédures criminelles des tribunaux d’Agen, de Cahors et d’Auch y sont instruites, NDLR]. C’est elle qui m’a appris l’existence, à Gramat (Lot) d’une école dédiée à l’éducation des chiens : le CNICG (Centre national d’instruction cynophile de la gendarmerie). J’ai rencontré le directeur de cette école, le colonel Dalier, auquel j’ai proposé de mettre en place des stages destinés à des jeunes ayant commis des incivilités, en tant qu’alternatives aux poursuites. L’idée était de mettre ces jeunes au contact des malinois en formation à la gendarmerie. L’expérience a été un succès. Un jour, le colonel Dalier m’a suggéré l’idée de faire bénéficier les victimes d’agression de la présence canine. Ainsi est né CAVE CANEM, avec Lol…

30MA. Quelles ont été les premières missions de Lol ?

Lol est arrivé le 14 mars 2019 pour intervenir dans le champ d’action des tribunaux de Cahors et d’Agen. Le 29 mars, une première petite fille âgée d’à peine 5 ans [victime d’agression sexuelle, NDLR] a bénéficié de sa présence. Alors qu’elle refusait de sortir de la voiture pour être entendue par les enquêteurs, elle a finalement accepté de descendre du véhicule en apercevant le chien. S’en sont suivies 37 minutes d’audition... lors desquelles l’enfant n’a pas lâché Lol une seule seconde ! Rien que d’en parler, j’en ai encore des frissons. Puis, nous avons été appelés pour accompagner un petit garçon, lui aussi victime d’agression sexuelle. Alors qu’il avait cessé de s’exprimer face aux enquêteurs en se tournant vers le mur, le chien s’est couché sur le dos en remuant la queue. Son comportement a intrigué l’enfant, qui s’est alors remis à parler. L’entretien aura duré 45 minutes.

30MA. Quel est précisément le rôle de Lol dans ces situations où la tension règne ?

 

L’animal libère la parole, quelle que soit cette parole.
Frédéric Almendros

Lol a pour mission d’« interagir sans agir ». Je vais reprendre les termes employés par une jeune femme qui a bénéficié de sa présence : « Lol ne me juge pas ». Que vous soyez enquêteur, avocat, juge, procureur… On se porte tous un regard les uns sur les autres. Tous, sauf le chien. Lui ne vous juge pas, il est là pour absorber les émotions et pour diminuer le stress autour de lui. En tant que maître de 4 canidés dont un Cane corso, j’ai remarqué que Lol avait dans ses yeux la profondeur d’un « regard d’humain ». En revanche, il n’est pas là pour « apporter la preuve ». Ce n’est pas parce qu’une personne est accompagnée du chien, qu’elle dit forcément la vérité ! L’animal libère la parole, quelle que soit cette parole. Il est d’ailleurs arrivé qu’un bénéficiaire accompagné de Lol livre une première version des faits, puis une seconde version différente... Son rôle, c’est avant tout de rassurer. Je dirais même que le chien « humanise » le procès pénal. Cette semaine, pour la première fois, Lol est intervenu aux côtés d’une personne mise en examen à la demande d’un juge d’instruction. Preuve, s’il en fallait, que le chien permet à tout bénéficiaire de traverser le procès pénal le mieux possible : il se fiche que vous soyez la victime ou le mis en accusation.

30MA : Y a-t-il un risque, pour le chien lui-même, à être exposé à toutes ces émotions ?

F.A. : Dès le départ, la condition sine qua non pour moi a toujours été celle-ci : que le chien ne souffre pas. Dans les jours qui suivent une audience au tribunal, Lol fait des pellicules. Une façon, peut-être, de « rendre » les émotions qu’il a absorbées. Mais nous restons très attentifs à tout signe qui trahirait un impact sur sa santé : prise de poids, apathie – c’est-à-dire plus d’apathie que d’ordinaire puisqu’il est d’un naturel calme… Cela n’est jamais arrivé jusqu’à présent.

30MA : Quelles sont les perspectives d’avenir pour les chiens d’assistance judiciaire ?

 

Lol a dans ses yeux la profondeur d’un « regard d’humain ».
Frédéric Almendros

Au niveau local, je voudrais pouvoir valider « médicalement » le programme. Il s’agirait qu’un médecin aille voir plusieurs bénéficiaires de Lol – volontaires pour participer à l’expérience – afin de les examiner avant, pendant et après chaque étape de la procédure judiciaire, en mesurant par exemple leur rythme cardiaque et leur taux d’ocytocine et d’adrénaline [hormones respectivement impliquées dans les émotions liées à l’attachement et au stress, NDLR]. Cela a déjà été fait aux États-Unis, avec des résultats très concluants ! Au niveau national, l’objectif est la généralisation du programme à l’ensemble du territoire [des chiens d’assistance judiciaire sont déjà opérationnels dans plusieurs autres tribunaux : Nevers, Strasbourg ou encore Orléans, NDLR]. L’idée est de proposer au ministère de la Justice un programme « clé en main », ce qui implique de couvrir les coûts liés à l’hébergement de l’animal et à sa formation [20.000 euros par chien, NDLR].

Commenter

  1. Goupil54 29/06/2021 à 09:51:33

    L'animal aide et aime l'humain .... l'humain devrait s'en inspirer !

  2. pouguy 26/06/2021 à 18:17:07

    là, je ne comprends pas du tout, si les chiens sont bénéfiques pour la justice pourquoi ne sanctionne-t-elle pas mieux leurs bourreaux

  3. mamy evette 24/06/2021 à 10:20:51

    Bravo à Lol ! La bienveillance mutuelle est la véritable relation unissant un animal à son humain et pouvant apporter à d'autres une aide si précieuse.

  4. nous pour eux 23/06/2021 à 18:46:23

     

    Si l'être humain pouvait être aussi respectueux que les animaux nous virerions dans un meilleur monde ! Mais nous sommes bien au loin de tout cela.... Quand on pense aux tortures que subissent bon nombres d'animaux dans le monde c'est inimaginable et insoutenable.

     

  5. AID 23/06/2021 à 12:53:18

    Les animaux sont fantastiques et les humains qui le croit et les respectent aussi ... les autres ... entièrement de.accord avec vous ANNEV 

  6. AnneV 18/06/2021 à 18:22:16

    Les animaux sont bienveillants, ne jugent pas et s'ils attaquent, c'est pour protéger leur maître ou se protéger des tortionnaires. Ce sont des être merveilleux (et là, je généralise = tous les animaux sont merveilleux !!) Mais l'humain, vous savez "supérieurement-supérieur" massacre, torture, abandonne et cesse de penser dès qu'il s'agit de le confronter à l'intelligence, à l'empathie et à la sensibilité des animaux. Encore une chance que certains d'entre nous évoluent et ne se contentent pas d'un QI de Hamburger !