Un collectif d’associations, dont la Fondation 30 Millions d’Amis, interpelle la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Sylvie Retailleau, sur la question de l’expérimentation animale. Plus précisément, sur la nécessaire mise en conformité des comités d’éthique avec la réglementation. Une responsabilité qui incombe au ministère.
Doit mieux faire ! L’expérimentation animale en France est normalement régie par des règles. Notamment, chaque projet de recherche impliquant des animaux doit être apprécié en amont par un comité d'éthique, ce qui est censé constituer un garde-fou et donc éviter des protocoles trop cruels au regard de son bénéfice espéré.
Malheureusement, ces comités ne répondent pas systématiquement à la réglementation en vigueur, si l’on se réfère au premier bilan annuel des comités d’éthiques en expérimentation animale (CEEA), publié en novembre 2022 par le Comité de Réflexion Éthique de l’Expérimentation animale (CNREEA) et qui concerne l’année 2021.
Un bilan qui soulève des interrogations
C’est pourquoi la Fondation 30 Millions d’Amis, Transcience, One Voice, Pro anima et Antidote Europe, réunis en collectif, adressent un courrier à Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, lui demandant de s’assurer que la réglementation soit bien suivie.
Les associations cosignataires se réjouissent qu’un bilan annuel d’activité des comités d’éthique en expérimentation animale ait été publié. Toutefois, elles estiment qu’il soulève un certain nombre d’interrogations, notamment en ce qui concerne l’application rigoureuse des textes par les CEEA et leur capacité à réaliser les missions qui leur incombent conformément aux textes en vigueur.
Le collectif interpelle donc l’autorité compétente afin qu’elle puisse garantir l’indépendance et l’impartialité des comités d’éthique. Notamment, en ne délivrant pas d’agrément aux comités mono-établissement (ou en retirant/suspendant les agréments qui auraient déjà été délivrés à de tels comités). En effet, si un comité n'est rattaché qu'à un seul établissement (c'est-à-dire la structure au sein de laquelle se déroulent les recherches évaluées par le comité), son indépendance et son impartialité sont fortement compromises, puisque ses membres sont bien plus susceptibles de subir des pressions.
La souffrance animale peu prise en compte
En outre, le collectif demande à la ministre de garantir la proportionnalité de la représentation des cinq « compétences » requises au sein des CEEA, et que – si problème de recrutement il y a pour une ou plusieurs catégorie(s) – qu’il publie sur son site les postes vacants dans les différents CEEA afin que les personnes qui souhaiteraient candidater puissent le faire en ligne.
La réglementation exige en effet que cinq compétences soient représentées au sein de chaque comité. Cette exigence a pour but de s'assurer que les intérêts qui s'opposent dans le cadre d'une expérience impliquant des animaux soient tous représentés (c'est-à-dire ceux des animaux, ceux de la recherche, ceux du projet...). Or, le rapport du CREEA permet de constater que les "compétences" relatives à la souffrance animale sont sous-représentées dans les comités.
La France manque à ses obligations européennes
Il est également demandé à la ministre de garantir que chaque comité traite un nombre minimum de dossiers chaque année et que - dans le cas contraire - les établissements utilisateurs soient rattachés à un autre comité.
Par ailleurs, le collectif veut s’assurer que le ministère contrôle la réalisation effective des appréciations rétrospectives par les concepteurs de projet. Il s’agit d’un rapport réalisé après que le projet soit terminé, et qui vise notamment à analyser l’impact de ce projet sur les animaux utilisés (gravité des expériences, des souffrances infligées, nombre d’animaux utilisés…).
Ces documents sont obligatoires pour les procédures les plus sévères (celles qui impliquent le plus de souffrance pour les animaux), et le droit de l’Union européenne fait obligation de aux Etats membres de s’assurer qu’ils sont bien réalisés. Or, en France, ils ne sont pas transmis au ministère, qui ne peut donc pas remplir sa mission, de sorte que la France manque à ses obligations européennes.
Un rapport qui pointe un énorme manque de moyens
De plus, le collectif demande que l'autorité de tutelle s’assure, avant de délivrer un agrément, que le CEEA demandeur répond en tous points aux exigences de la réglementation et qu’il disposera notamment de tous les moyens nécessaires à son fonctionnement. Le rapport du CNREEA pointe en effet un énorme manque de moyens. Là encore, cette question est une obligation réglementaire, qui n'est pas respectée.
Enfin, les 5 associations signataires attendent que l’autorité de tutelle s’engage à ce que ce soit réalisé chaque année un audit des CEEA – publié ou transmis sur demande – sachant que le nombre pléthorique des comités est un obstacle à un fonctionnement homogène et qu’il nuit à la possibilité pour chacun de réunir des ressources d’ampleur, à la hauteur des enjeux (moyens matériels et compétences).
Au-delà du strict cadre réglementaire, le collectif s’accorde également sur le fait qu’il serait souhaitable que le ministère s’implique concrètement dans la formation permanente des membres des comités d’éthique (ce qui à ce jour n’est pas obligatoire). Notamment en matière de nouvelles approches n’utilisant pas d’animaux, d’outils pédagogiques alternatifs à l’utilisation d’animaux, de réglementation et d’éthique. Et par la création d’un fichier national d’experts indépendants qui pourraient éclairer les membres des CEEA dans leur évaluation - notamment dans l’application de la règle des 3R et particulièrement du ‘’Remplacement’’ – qui serait à envisager dès que possible.
9 Français sur 10 favorables à l’interdiction de toute expérimentation animale
De même, la Fondation 30 Millions d’Amis, Transcience, One Voice, Pro anima et Antidote Europe s’interrogent sur les dispositifs qui pourraient être mis en œuvre pour permettre aux membres des comités d’éthique de gagner en compétences. Particulièrement dans le domaine des méthodes de recherche non-animale d’une part, et de valoriser leur mission auprès des établissements utilisateurs d’autre part.
Sur l’ensemble des points, les réponses de Sylvie Retailleau, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, sont très attendues. Pour rappel, selon le dernier baromètre* annuel « Les Français et le bien-être animal », près de 9 sondés sur 10 (88 %) sont favorables à l’interdiction de toute expérimentation animale lorsqu’il est démontré que des méthodes substitutives peuvent être utilisées à la place ; un score qui s’élève à 91 % chez les électeurs d’Emmanuel Macron au 1er tour de l’élection présidentielle de 2022.
*Enquête Ifop pour la Fondation 30 Millions d’Amis menée du 4 au 5 janvier 2023 auprès d’un échantillon de 1007 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Représentativité assurée par la méthode des quotas.
AnneV 28/02/2023 à 18:06:27
Demander à ce que soit prise en compté la souffrance de ces pauvres animaux ? Il faudrait leur greffer un coeur à tous ces "respnsables" !!!!!!!!