Il y a eu l'année du dauphin, puis celle de la tortue. Rien à voir avec l'astrologie chinoise ! 2009, elle, sera placée sous le signe du gorille. C'est ce qu'ont annoncé les représentants de plus de cent pays réunis le 2 octobre 2008 à Rome, lors de la IXème conférence des pays membres de la convention des Nations Unies sur la conservation des espèces migratoires animales (CSM).
Il y a eu l'année du dauphin, puis celle de la tortue. Rien à voir avec l'astrologie chinoise ! 2009, elle, sera placée sous le signe du gorille. C'est ce qu'ont annoncé les représentants de plus de cent pays réunis le 2 octobre 2008 à Rome, lors de la IXème conférence des pays membres de la convention des Nations Unies sur la conservation des espèces migratoires animales (CSM).
En proclam
ant l'
année
2009 "année du gorille" la
CSM (conservation des espèces migratoires) l
ance un appel au don et espère réunir plus d'un demi million d'euros pour préserver cette espèce dont il reste moins de 6000 individus en Afrique.
Proie des braconniers, victimes collatérales des conflits interethniques ou des maladies, les gorilles disparaissent au même rythme que la forêt tropicale africaine. Après le dauphin et la tortue, c'est sur leur sort que se penchent les Nations unies. En l
anç
ant la Yog 2009 (Year of Gorilla 2009), la conservation des espèces migratoires
animales s'est entourée des plus éminents spécialistes des gr
ands singes.
Jane Goodall a été promue "marraine" et I
an Redmond "ambassadeur" de la Yog 2009.

Ian Redmond©www.photoianredmond.org
Digne successeur de Di
an Fossey (la papesse des gorilles), I
an Redmond est également consult
ant en chef du
GRAPS (Great Apes Survival Partnership). Il confie à la Fondation 30 Millions d'Amis ses espér
ances concern
ant l'
année 2009. Selon lui, la préservation du gorille passe par celle de son habitat, la forêt tropicale. Une forêt considérée comme l'un des trois plus gr
ands puits de carbone de la pl
anète. Notre espoir de survie à tous.
Fondation 30 Millions d'Amis : Pourquoi avoir choisi le gorille comme espèce de l'année 2009 ?
Ian Redmond : Le gorille est le seul gr
and singe qui soit répertorié par la CMS, la convention des espèces migratoires. C'est donc la seule espèce que l'on pouvait célébrer de cette m
anière. Il y a 4 espèces de gorilles et pour chacune un pl
an d'action a été dessiné au cours du "Gorilla's Agreement" signé par les membres de la CMS à Rome en octobre 2008. Il ne nous reste plus qu'à trouver les fonds et tout mettre en place.
Pour information, il n'y a pas une espèce de gr
and singe qui ne soit en d
anger d'extinction... La seule dont la population soit en hausse const
ante est celle des gorilles de montagne, ceux qui vivent au Rw
anda, en Oug
anda et à l'est de la RDC. Ceux-là ont déjà bénéficié d'aides internationales, mais aussi d'un pl
an de préservation mis en place par les gouvernements des pays où ils vivent depuis 30
ans. J'en veux pour preuve le fait que les gorilles sont devenus la première ressource en terme touristique au Rw
anda. C'est tout un travail d'éducation, de compréhension, de vie en commun qui a été mis en place d
ans ce pays. Nous souhaiterions obtenir le même résultat d
ans d'autres pays avec les autres espèces de gorilles et de voir ainsi se renverser la situation de leur survie comme au Rw
anda.
F30MA : De quelle manière la préservation des gorilles permet le développement de populations en difficulté ?
I. R. : Il y plusieurs réponse à cette question... Les gorilles sont des espèces clefs d
ans leur éco système, leur habitat. Ce sont les "gardiens de la forêt", ses jardiniers. Et cette forêt est aussi import
ante pour eux que pour les hommes qui vivent autour ou ded
ans. La plupart des arbres fruitiers doivent leur existence aux gorilles. Imaginez qu'il y a deux ou trois cents
ans, un gorille a cueilli un fruit, l'a m
angé, l'a digéré et que les graines contenues d
ans ce fruits ont été ensuite rép
andues d
ans les excréments du gorille, un peu plus loin sur le sol de la forêt.Cette graine a gr
andi, s'est tr
ansformée en arbre, et nous pouvons aujourd'hui profiter de cette alchimie. Si nous voulons qu'il y ait toujours des arbres fruitiers d
ans les forêts d'Afrique d'ici à une centaine d'
années, nous devons nous assurer qu'il y aura aussi des gorilles pour entretenir cette forêt.
F30MA : Quels risques encourent les populations qui se nourrissent de viande de gorille ? Le destin de l'homme et de l'animal est-il lié ?
I. R. : La plupart des gens renâclent à l'idée de consommer la chair d'un
animal qui nous ressemble t
ant, comme en Europe. Au Rw
anda et en Oug
anda, les gorilles sont considérés comme des voisins [géographiquement et génétiquement (NDLR)] à part entière, plus que comme des
animaux comestibles.
Cela dit, pour les quelques tribus en Afrique qui consomment de la vi
ande de gorille, celle-ci n'est pas considérée comme n'importe quelle vi
ande. Au contraire ! On lui prête des vertus à l'image de l'
animal dont elle provient : puiss
ance, force, énergie... Ce sont surtout les chefs de ces tribus qui consomment cette vi
ande lors de dîners initiatiques ou lorsque des convives prestigieux ven
ant des villages voisins sont invités. Il faut aussi noter ce paradoxe : bien qu'interdite, la chasse au gorille reste très d
angereuse et le chasseur lui-même est considéré comme un héro et un être puiss
ant.
Il est toutefois nécessaire de les dissuader de consommer de la vi
ande et de continuer à chasser. Si leurs pratiques se limitaient à leur village, elles resteraient confidentielles et marginales, mais elles nourrissent malheureusement un commerce plus large qui s'étend aux gr
andes villes... Leur chasse traditionnelle qui n'a lieu qu'un ou deux jours d
ans l'
année se tr
ansforme en un braconnage quotidien motivé seulement par l'appât du gain et de l'exotisme. C'est une plaie qui touche aut
ant les gorilles que les
antilopes, les chimp
anzés. Aujourd'hui, le marché de la vi
ande de brousse connaît une recrudescence impressionn
ante. Des milliers de tonnes arrivent chaque jour aux abords de gr
andes villes par vélo, moto, auto ou bus.

Titus en famille©UNESCO/Ian Redmond
Lorsque je croise l'un de ces consommateurs de vi
ande de brousse ou l'un de ces chasseurs, j'essaye de leur faire comprendre qu'ils arrêteront forcément un jour ou l'autre, mais ils peuvent choisir qu
and et comment : soit en arrêt
ant d'eux-mêmes et en particip
ant à la préservation de la forêt et de sa faune, soit en arrêt
ant contraints par le simple fait qu'il n'y a plus rien à chasser ! A titre d'exemple il suffit d'une balle pour tuer un dos argenté [gorille mâle domin
ant (NDLR)], mais il faudra au moins quinze
ans pour qu'il ait un successeur. A condition bien sûr qu'il reste des femelles et des petits...
Or la population des gorilles est une population qui ne se renouvelle que très lentement. Des menaces telles que la chasse, la guerre ou Ebola déciment des familles entières. Très souvent, les épidémies d'Ebola observées chez les hommes sont liées à la consommation d'une carcasse de gorille découverte non loin du village. Il suffit même qu'un membre du village ait m
anipulé la carcasse s
ans même que la vi
ande soit consommée pour qu'il soit infecté.
F30MA : De combien d'argent auront besoin les plans d'action pour pouvoir être mis en place ?
I. R. : Le budget total pour toutes les actions est de cinqu
ante millions de dollars [39 millions d'euros (NDLR)]. Nous comptons sur les levées de fonds qui auront lieu tout au long de l'
année. Nous espérons que les raisons pour lesquelles il est import
ant de préserver les gorilles toucheront non seulement les individus mais aussi les gouvernements. Alors que nous nous parlons [interview réalisée le 9/12/2008 (NDLR)], la conférence internationale sur le ch
angement climatique a lieu, en ce moment même, à Pozn
an [ouest de la Pologne (NDLR)].
S'il est vrai qu'on peut ne pas immédiatement percevoir le lien exist
ant entre la défense des gorilles et le ch
angement climatique, il suffit de se rappeler que les gorilles sont une espèce clef d
ans la préservation des forêts tropicales. Or les forêts d'Afrique sont les deuxièmes plus import
antes du monde après la forêt amazonienne et av
ant celle d'Indonésie. La s
anté de la pl
anète, son climat dépendent de ces forêts et du rôle de filtre naturel qu'elles jouent. Ce sont trois poumons gig
antesques, chargés de purifier et l'eau et l'air que nous buvons et respirons. La pl
anète toute entière dépend de ces trois forêts tropicales, qui elles-mêmes dépendent de la capacité de la faune qui les peuplent à disperser les graines des différentes essences qui les composent, pour assurer les générations d'arbres futures.

Déforestation en République Démocratique du Congo©UNESCO/Ian Redmond
F30MA : Que ressent-on quand on est nommé "ambassadeur" de l'année du gorille 2009 ?
I. R. : Je le vis comme un honneur parce que les gorilles sont parmi mes amis les plus
anciens (rires). J'ai commencé à les fréquenter à ma sortie de l'université, au moment où je suis devenu l'assist
ant de Di
an Fossey. J'étais encore un enf
ant à cette époque, et les gorilles avec lesquels je me suis entendu l'étaient aussi. Aujourd'hui nous avons gr
andi ! J'ai des enf
ants, eux aussi ! J'ai d'ailleurs réalisé un documentaire pour la BBC :
"Titus : The Gorilla King". Qu
and j'ai rencontré Titus, il avait 2
ans et moi 22. Nous nous sommes retrouvés
année après
année et aujourd'hui, lui a 34
ans et moi 54 !
C'est à travers nos deux vies que nous pouvons témoigner des ch
angements qui ont eu lieu au Rw
anda, par exemple. Un pays dont l'économie touristique repose presque exclusivement sur les gorilles. Cette réussite peut aussi être un exemple à suivre d
ans d'autres pays comme le Gabon, le Congo ou la RDC. Un exemple aussi en terme d'éch
anges culturels. Au Rw
anda, les touristes qui viennent rendre visite aux gorilles font aussi la connaiss
ance des tribus locales et découvrent leur culture, leurs traditions, leur art. Et l'éch
ange qui a lieu est intense.
F30MA : Comment peut-on aider, chacun à son niveau, à préserver les
gorilles ?
I. R. : N'importe qui peut s'engager, aider, en coupl
ant trois actions. La première : en ét
ant un acheteur responsable et en privilégi
ant les produits "durables". Lorsqu'on achète un article en bois, par exemple, il ne faut pas hésiter à dem
ander au vendeur d'où vient le bois dont est fait l'objet. De la même m
anière lorsqu'on achète du shampoing, un rouge à lèvres ou du beurre à base d'huile de palme, il ne faut jamais hésiter à dem
ander si cela provient d'une production durable ou non. N'importe qui peut faire cet effort. La deuxième : faire pression au niveau des politiques et faire comprendre aux représent
ants de nos pays que nous avons besoin des forêts et qu'il faut les protéger. La troisième, enfin : aider les org
anisations non gouvernementales en fais
ant un don. Il en existe des centaines, du
WWF en pass
ant par la
Born Free Fondation. L'org
anisation
Ape Alliance regroupe près de 70 autres org
anisations, par exemple... On a que l'embarras du choix !
genevieve.soubrier@aliceadsl.fr 13/12/2008 à 01:10:44
felinatiger 11/12/2008 à 20:14:53
chypie2B 10/12/2008 à 18:04:26