Dans un nouveau rapport, le WWF France expose des données inquiétantes sur la préservation des espèces animales. L’ONG indique que les populations d’animaux sauvages vertébrés ont diminué de 73 % entre 1970 et 2020. Yann Laurans, directeur des programmes de l’ONG, revient sur ce triste constat pour 30millionsdamis.fr.
30millionsdamis.fr : Il y a deux ans, vous évoquiez une disparition de « 69 % des populations d’animaux vertébrés entre 1970 et 2018 ». Aujourd’hui, « c’est 73 % en 50 ans ». Pourquoi aucune amélioration ?
Yann Laurans : L’Indice Planète Vivante 2024 mondial (IPV) indique une chute de 73 % des populations d'animaux sauvages vertébrés entre 1970 et 2020 (69 % en 2022, 68 % en 2020, 60 % en 2018, 58 % en 2016, 52 % en 2014). L’IPV prend en compte 35 000 populations d’animaux sauvages vertébrés appartenant à 5 495 espèces (soit 265 nouvelles espèces et plus de 3 000 nouvelles populations). De fait, les deux chiffres ne peuvent pas être comparés car ils ne sont pas sur les mêmes bases. Néanmoins on constate un déclin général de l'abondance d’animaux vertébrés depuis cinquante ans.
Quelles sont les plus grandes menaces qui pèsent sur ces animaux ?
Les cinq prochaines années seront déterminantes pour ne pas atteindre les points de bascule.
La principale cause de perte de la biodiversité est la dégradation de l’habitat des animaux due à l'agriculture en premier lieu, et ensuite l'urbanisation, la surexploitation/surpêche, le changement climatique, la pollution, les espèces invasives et les maladies.
Parmi les espèces, lesquelles sont les plus touchées ?
Les populations d'eau douce ont subi les déclins les plus importants, avec une baisse de 85 %, suivies par les populations terrestres (- 69 %) et marines (- 56 %).
Dans votre rapport, vous dites que les cinq prochaines années seront déterminantes pour l’avenir de la vie sur Terre…
Oui. Les cinq prochaines années seront déterminantes pour ne pas atteindre les points de bascule. Un point de bascule est lorsque les impacts cumulés atteignent un certain seuil, cela entraîne une réorganisation du système, souvent brutale et potentiellement irréversible.
Pouvez-vous nous donner un exemple précis ?
En Amazonie, le changement climatique et la déforestation entraînent une diminution des précipitations. Les conditions environnementales devenant inadaptées à la forêt tropicale, un point de bascule pourrait être atteint. Cela entraînerait des conséquences dévastatrices pour les communautés locales et la faune, avec des pertes irréversibles de biodiversité et de valeur culturelle. Les modèles météorologiques régionaux et mondiaux seraient modifiés. Il y aurait des répercussions sur la productivité agricole et la sécurité alimentaire mondiale. Avec l’accélération du changement climatique mondial, l'Amazonie passerait du statut de puits de carbone à celui de source d'émissions, en raison des incendies et du dépérissement des plantes. Ce point de bascule pourrait être atteint si 20 à 25 % de la forêt amazonienne étaient détruits, sachant que 17 % ont déjà été déboisés... Les taux de déforestation actuels pourraient conduire à ce scénario en l'espace d'une décennie.
Comment éviter ces situations dramatiques ?
En France, 17 % des espèces recensées sont menacées et près de 200 espèces ont déjà disparu.
Avant toute chose, il faut encourager la transition des systèmes alimentaires et une transition vers l’agroécologie. Il faut mieux protéger et restaurer. La France n’est pas épargnée par l’effondrement de la biodiversité (17 % des espèces recensées sont menacées et près de 200 espèces ont déjà disparu). Il faut accélérer la réorganisation des usages de l’eau, la réduction des pesticides via la révision d’Ecophyto ainsi que la lutte contre la bétonisation.
Qu’attendez-vous de la Cop16 qui se déroulera en Colombie, du 21 octobre au 1er novembre 2024 ?
Le WWF appelle à la mise en œuvre de l’accord mondial sur la biodiversité adopté à Montréal (Canada), à suspendre les subventions dommageables à la biodiversité, à apporter des financements pour honorer la promesse d’aide internationale faite à Montréal et enfin à faire progresser à la COP16 tous les outils de protection internationale des océans.
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