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Culture

Ce photographe s’invite au plus près des rapaces nocturnes

Aurélien Agnus mène un travail de fond sur les rapaces nocturnes, en particulier le Hibou des marais. ©Aurélien Agnus

Naturaliste et photographe animalier depuis plus de vingt ans, Aurélien Agnus part à la recherche des chouettes et hiboux, au plus proche de leur habitat. 30millionsdamis.fr a échangé avec ce passionné des rapaces nocturnes qui alerte sur les nombreux dangers dont ces oiseaux sont victimes.

Chaque année, Aurélien Agnus se rend sur le même site pour observer le Hibou des marais, un rapace migrateur vivant au sol, dissimulé au sein des herbes hautes. Photographe et naturaliste, le passionné affirme passer « plus de temps avec des jumelles autour du cou qu’avec un appareil photos ». « Cela a commencé au milieu des années 2010, où je cherchais à rencontrer le hibou des marais. C’est lui qui est venu à moi. Un jour de brouillard, il est apparu où je ne l’attendais pas », se souvient Aurélien Agnus, contacté par 30millionsdamis.fr. Cette rencontre, le photographe la partage dans l’ouvrage « Chouettes et Hiboux, les yeux dans les yeux » (Delachaux et Niestlé, 2024) où il raconte ses plus belles expériences de terrain en images. Chevêche d’Athéna, Hibou grand-duc, chouette hulotte… Le spécialiste dévoile le mode de vie de treize espèces animant les crépuscules d’Europe : « Les rapaces nocturnes sont, à mes yeux, des oiseaux fascinants ! »

Des oiseaux discrets, tolérants vis-à-vis de l’humain

En quinze années de terrain, Aurélien Agnus connaît ces familles d’oiseaux comme sa poche. « Ce sont des animaux très discrets avec une vue et une ouïe très développées, décrit le naturaliste à 30millionsdamis.fr. Les rapaces nocturnes sont plutôt confiants envers les autres espèces animales, y compris l'homme. Le revers de la médaille est que cette confiance amène régulièrement du dérangement envers ces oiseaux »

Hibou des marais ©Aurélien Agnus

Malgré cette facilité d’approche, le spécialiste affirme que les rapaces nocturnes « ne sont pas faciles à observer ». Toutefois, avec beaucoup de patience et en restant à une distance suffisante de leur lieu de vie, « on peut en apercevoir en plein vol, venant jusqu’à nous, affirme Aurélien A. Si l’on reste par exemple dans sa voiture, on peut apercevoir certaines espèces, notamment le hibou des marais, se poser sur un piquet de clôture, une branche ou un perchoir un peu surélevé pour faire sa toilette ou se poser pendant ses heures de chasse ». À profiter avec, ou sans appareil photos !

Des espèces victimes de multiples dangers

Mais au fil du temps, l’expert constate une diminution drastique du nombre d’individus au sein de leurs milieux de vie. Oiseau rare et migrateur, le hibou des marais s’avère grégaire, créant au sein de son habitat des « dortoirs hivernaux ». Toutefois, sa population, estimée en France entre 200 et 500 individus, devient de plus en plus difficile à observer. « En 2015, le site comptait une cinquantaine d’individus, soit un dixième de sa population au même endroit. Petit à petit, j’en relevais entre 20 et 50 individus, puis entre 2 et 10 au fil des années. Là, cela fait deux ou trois ans que je n’en vois quasiment aucun », alerte le francilien.

Hibou moyen-duc ©Aurélien Agnus

Les hypothèses qui peuvent expliquer cette raréfaction sont nombreuses. Mauvaise nidification, développement des éoliennes autour des sites stratégiques… les rapaces nocturnes représentent surtout « les premières victimes des impacts environnementaux », souligne le photographe.

Parmi eux, les pesticides nuisent à la vie de ces oiseaux prédateurs. « Tous les produits chimiques utilisés tuent lentement les micro-mammifères, eux-mêmes chassés et ingérés par les rapaces nocturnes, alors qu’ils représentent de véritables alliés pour l’agriculture, explique le spécialiste. Par exemple, une seule chouette effraie qui donne naissance à des petits va chasser entre 2000 à 3000 campagnols par an. »  

Un habitat réduit

D’autres activités perturbent le mode de vie de ces rapaces nocturnes, en particulier le trafic routier, véritable fléau pour ces oiseaux, ou encore la destruction de leur habitat. « L’effraie des clochers et la chevêche d’Athéna vivent vraiment tout proche de l’homme, que ce soit dans certains bâtiments ou dans de vieux arbres à cavités. Par définition, si l’homme impact son milieu, leurs populations sont impactées », prévient Aurélien Agnus. Sur le terrain, le naturaliste observe une nette différence depuis la fermeture des clochers au sein des villages, et tente d’alerter sur les impacts de l’abattage de vieux arbres, conséquence directe du dénichage pour les chouettes.

Hibou des marais ©Aurélien Agnus

Protégées depuis 1972, les rapaces nocturnes restent exposés aux menaces. « Il faut que les textes soient appliqués, que le braconnage soit puni plus sévèrement dans les cas existants, limiter les pesticides, rouvrir les granges et les clochers pour la chouette effraie, et pourquoi pas installer des nichoirs en forêt pour la chouette hulotte », suggère le passionné.

Nidification en période de moisson

Parmi les rencontres anecdotiques du photographe, un couple de hiboux des marais venu nicher au coeur d'un champ de blé en Essonne, juste avant la moisson. "J’ai eu la chance de pouvoir protéger la première nichée essonnienne, détaille Aurélien Agnus. L'agriculteur du champ a accepté de retarder la fauche et laisser le temps aux petits de savoir voler. On a passé une semaine à les chercher, en vain". Une recherche pour le moins complexe puisque "le hibou des marais vit au sol et ne fait pas de nid, rappelle le naturaliste. On ne les a jamais retrouvés, bien qu'on les entendait tous les soirs".

Pour leur éviter toute fatalité, le francilien et l'agriculteur, sensibilisé à la préservation de la biodiversité, auraient tenté de cercler ces spécimens sur un petit périmètre. "La protection de ces oiseaux passe par la communication entre le monde agricole et le monde naturaliste", assure le spécialiste. Heureusement, l’anecdote connaît un heureux dénouement : « Le jour où la moisson a sonné, l’agriculteur a aperçu les petits en plein vol ».